La présence du loup est-elle compatible La présence du loup est-elle compatible avec le pastoralisme?

POUR

CONTRE

CHRISTOPHE AUBEL, secrétaire national de France nature environnement, chargé de la mission portant sur le loup

«Ce n'est pas en tuant le loup que l'on résoudra le problème»

«Non seulement c'est possible, mais c'est souhaitable. Cela existe dans d'autres pays européens, alors pourquoi pas en France? Le loup est présent en France depuis dix ans, c'est bien la preuve que c'est possible. Le pastoralisme n'est pas ignoré pour autant. Nous savons que la présence du loup est une contrainte forte pour un troupeau ou un berger, mais on peut l'atténuer par des méthodes de prévention qui font leurs preuves. Les mesures tiennent essentiellement au chien de protection (le patou) et à la présence d'un berger. La mise en place de ces moyens est d'ailleurs l'occasion de valoriser le métier de berger. Chaque année, la mort de 1.500 brebis est attribuée à la prédation du loup, alors que 20.000 brebis sont tuées par des chiens errants dans les Alpes. Ponctuellement c'est important, mais cela ne menace pas le pastoralisme. Le plus grand danger c'est la concurrence néo-zélandaise liée à la mondialisation.

Cela peut marcher

Dans les Alpes-Maritimes on compte une douzaine de loups et neuf dans les Hautes-Alpes. 97 brebis ont été tuées dans les Hautes-Alpes et 1.152 dans les Alpes-Maritimes, où les brebis sont pourtant moitié moins nombreuses. La différence s'explique par les moyens de protection mis en place. Lorsque la prévention est organisée, la prédation chute sensiblement. Cela peut marcher, c'est une affaire de volonté. Ce n'est pas en tuant le loup que l'on résoudra le problème. La question du loup pose celle de la place que notre société veut réserver à la nature. Je défie quiconque de prouver que cette cohabitation est impossible tant sur le plan écologique qu'économique.»

RENÉ BLANCHET, président de l'Association européenne de défense du pastoralisme contre les prédateurs

«Entre le loup et l'économie pastorale, il faudra choisir»

«Vous connaissez l'adage: on ne met pas un loup dans une bergerie. Comment laisser se côtoyer le plus féroce des prédateurs et le plus fragile des animaux? Je voudrais qu'on m'explique quelle est la justification, même écologique, au retour du loup. Ces deux espèces ne peuvent vivre ensemble sur le même territoire. Le retour du loup menace l'exercice d'un pastoralisme durable. Il faut des hommes partout et debout. Ce sont les moutons qui entretiennent le mieux ces espaces de montagne. S'ils disparaissent des alpages, la montagne deviendra une friche qui brûlera. Et il en sera fini des élevages, du tourisme et des villages qui en vivent. Les mesures de protection proposées (parcs, chiens de protection, cabanes pour bergers...) ne font que déplacer le problème. Les éleveurs qui ont mis en oeuvre les dispositifs de protection de nuit préconisés ont subi des attaques de jour. Ou alors, ce sont d'autres troupeaux qui sont attaqués.

Les éleveurs n'élèvent pas des brebis pour les voir dévorer

On n'imagine pas la détresse et les difficultés psychologiques des éleveurs. La cohabitation entre le loup et le mouton ne se passe pas mieux ailleurs. Les éleveurs italiens ou suisses sont confrontés aux mêmes difficultés. Depuis 1993, plus de 10.000 brebis ont été reconnues officiellement tuées dans les pâturages des Alpes par le loup. Cela peut paraître peu par rapport au cheptel ovin présent en France, mais c'est oublier que ces tueries sont concentrées sur les mêmes troupeaux. Entre le loup et l'économie pastorale, il faudra choisir, c'est une question de société.»

Evénements

Le 15 janvier, l'Association européenne de défense du pastoralisme contre les prédateurs tenait son assemblée générale.

Les 18 et 19 janvier, ont eu lieu les premières rencontres nationales de l'écopastoralisme (organisées par France Nature Environnement et l'Association pour la cohabitation pastorale).